TGRLIFRA 5A 792
TGRLIFRA 5 A 792
La TGRLIFRA est la Très Grande Randonnée LIttorale FRAnçaise, une promenade pédestre de quelques milliers de kilomètres sur la côte manchoise puis atlantique, avec quelques particularités…
– le parcours suivi est préférentiellement et autant que possible, au plus près du flot, quel que soit le niveau de marée.
Bien entendu, il peut arriver que des structures artificielles interdisent tout passage pédestre, que la marée haute rende impossible un franchissement durant des heures, ou qu’un arrêté municipal, préfectoral, voire ministériel déclare un passage illégal.
– le randonneur, la randonneuse, sont autonomes, sont donc indépendants de tout commerce, mais susceptibles de quémander de l’eau potable si aucune source ou fontaine n’est accessible durant leurs étapes. Bivouac systématique.
– L’impact écologique est réduit au maximum, donc pas deux véhicules pour les navettes…ouvertes à l’auto-stop ou transports en commun locaux, selon les cas.
– Equipe de 1, 2, 3 ou 4 personnes au maximum.
– étapes calibrées à 25/30 km en moyenne, conditions rustiques, portage minimalisé. Cette activité ne peut être menée en continu (estimation à 100 journées de la Belgique à l’Espagne) car nécessite une trop importante disponibilité.
Elle est menée selon un séquençage chiffré, chaque séquence. (Ici la cinquième: 5 ) étant composée d’étapes lettrées… (Ici la première : A )
Les points kilométriques maritimes (PKM) sont comptés depuis la frontière belge, en suivant le trait de côte majeur.
Il peut donc y avoir des longueurs non parcourues à pied du fait d’obstacles incontournables.Les parcours pédestres sont comptabilisés en kilomètres effectifs, (PK) qui diffèrent régulièrement des PKM du fait d’incursions dans les terres ou dans les villes et villages.
Etape 5 A : De Saint-Pierre-en-Port à Yport ( PKM 313 à PKM 325 général)
Bien qu’assez courte (moins de 15 km) cette partie randonnée fut riche d’aventures !
Une difficulté particulière est apportée par l’horaire des marées (aux alentours de 6 h et 18 h) et leurs coefficients (80 à 85).
Lever à 5h30 pour un démarrage effectif sur l’estran vers 6 h, avant l’aube !
Il faut marcher sur les galets instables puis sur le platier qui est ici très déchiqueté, strié de cannelures à-demi masquées par des fucus dentés ou des pelvéties canaliculées si on va le chercher au plus loin, et lorsque leur densité est importante et que les thalles se superposent en multicouche, le « terrain » devient très glissant et piégeux.
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Cependant les platiers sont plus favorables au déplacement que les champs de blocs plus ou moins amassés, et moins dangereux en cas de chute.
Par ailleurs, en cas d’accident invalidant, les platiers restent moins difficiles à parcourir en étant blessé, et surtout peuvent faciliter le repérage par des personnes et un éventuel secours…ce que les gros éboulis ne permettent guère, masquant la victime à la vue générale. Mais on reste optimiste…et on prend garde à soi !
Les falaises bien que le plateau dépasse les 100 mètres d’altitude, sont globalement un peu moins imposantes, moins régulièrement verticales et percées de petites grottes multiformes, plusieurs en hauteur, et on trouve régulièrement des secteurs de roches en couches moins cohérentes, avec des structures inégales.
Nombreux éboulements, plus ou moins récents, certains très importants et étalés, (et d’ailleurs récents, en 2020 et 2023) dans lesquels marcher peut s’avérer téméraire, blocs instables, chausse-trappes dissimulées par une végétation plus ou moins épaisse et épineuse.
Il est souvent préférable de les contourner, ce qui ajoute l’avantage d’être éloigné du pied des falaises.
En partant des Grandes dalles de Saint-Pierre-en-Port, on a ainsi un parcours assez diversifié, ici pratiqué en commençant à la renverse de marée et pour 6 m de marnage.
Au PK 02,30 on est au droit du bourg de Saint-Pierre, qui n’a que 150 m de rivage bas et que l’on passe facilement en dépit de nombreuses veines creuses dans le platier.
Au PK 07,10 la Valleuse d’Eletot offre un lien pédestre avec le plateau qui culmine à plus de 110 m d’altitude.
Ce lien dénivelle environ 70 m avec 1200 m de petite route soit 6% puis commence à plonger et dénivelle les derniers 30 m par des escaliers vétustes avec une inclinaison de près de 40%. La dernière longueur présente d’importantes dégradations, et se termine par un bout d’échelle rouillée affaiblie. Néanmoins, liaison à connaître en cas de nécessité car les variations de niveau des strates érodées font qu’à marée montante on peut très bien ne plus pouvoir aller ni vers Saint-Pierre ni vers Fécamp ! Cette valleuse est marquée par une grande fenêtre naturelle ouverte à travers une aile de la falaise.
Son parcours est censé être interdit suite à des éboulements divers depuis 2020/2023/2025… néanmoins, en cas de détresse, elle pourrait servir !
En poursuivant, on contourne judicieusement le vaste éboulis du Heurt de plus de 10 000 m², et on rallie une seconde valleuse salvatrice, si besoin, celle du Val de la mer de Senneville, dont le profil technique est tout à fait comparable à la précédente, mais nettement moins délabrée et donc peu périlleuse ! PK 08,20
Sauf erreur elle ne serait pas encore interdite…
Un peu plus loin on peut découvrir une carcasse de voilier métallique et, peu après des circulations d’eau torrentueuses dans les galets et blocs.
Un étonnant bruit de chute d’eau est alors perceptible, et oriente vers une modeste grotte marine peu profonde, dans laquelle il ne fait aucun doute qu’une véritable cascade y tombe.
D’un débit respectable, il n’est pas possible d’aller voir la taille du conduit d’émission sans être littéralement trempé, et sans équipement adapté…il faudra donc se résigner à se contenter (en rentrant) d’un petit article sur Internet traitant de cette Cascade du Heurt avec cheminée de 8 mètres et rivière souterraine remontée sur 300 mètres !
Un nouvel éboulis, le Saint-Nicolas, d’une étendue comparable au précédent gagne à être évité, avant de parvenir au premier véritable obstacle de la journée : la Porte à la Reine ( PK 11,50), avancée rocheuse de plus de 100 mètres dans la mer et d’une hauteur de 50 m à sa naissance puis de 20 mètres en moyenne sur sa grande longueur, dont une tentative d’escalade est fortement déconseillée vu la raideur des pentes et la nature peu fiable de la roche et de sa couverture terreuse.
Si cette tentative peut naître c’est qu’à mi-marée la Porte n’offre plus de passage hors-d’eau, notamment sous son arche présentant déjà deux mètres de fond…et parcourue de flots tourbillonnants.
Un essai jusqu’à la taille en essayant de se cramponner à la paroi dut être stoppé, sans succès mais avec sagesse…
Décision prise facilement de jouer l’attente, car décision anticipée dès la veille au soir, selon le contexte.
Le passage aurait encore été possible (mais pas à pied sec) 1 heure plus tôt.
Ceci s’est traduit par près de cinq heures d’attente…occupées à diverses actions !
Promenade d’observation des lieux (nombreux objets rejetés par les flots), démêlage d’un paquet de cordelette, création d’un cairn artistique nommé « Mistigri des mers » et d’une installation créative à base de silex naturellement percé…en sus de séchoirs d’habits improvisés…le tout avec la chance d’avoir vu le soleil émerger des falaises en parvenant à son zénith.
Ce sera donc vers 14 h 30 qu’il sera décidé de tout remballer et de franchir l’arche, mais avec encore pas mal d’eau, ce qui fit opter pour la sauvegarde du chandail et du pantalon…d’où une tenue d’Adam sauf chaussettes et chaussures !
Et heureusement, car ça montait encore largement au nombril !
Comme il faisait bon au soleil et que randonner en ces lieux permet d’être seul au monde, un séchage naturel fut à point nommé, juste le temps de découvrir la seconde porte de Fécamp : celle au Roi !!!
Fichtre ! Une sacrée création naturelle que cette porte, précédée d’un complexe de chenaux creux aux morphologies de canyons, profonds de 2 à 3 mètres, creusés dans le platier, comme une sorte de lapiaz. PK 11,80
Des surplombs de falaise bordés de grands coussins moussus révèlent la présence de coulées d’eau douce qui s’en échappent en cascatelles discrètes.
La Porte elle-même est circonvolutionnée, et très creuse, parcourue par un violent courant d’ouest en est (à marée montante au moins).
Infranchissable à pied sec avant la marée basse complète, et défendue par des parois de roche bombées en vis-à-vis, qui laissent craindre une chute brutale dans l’eau ( Donnée à 9°C le 11 avril) au moindre décrochement de prise, chute aggravée par le râclement corporel sur le rugueux calcaire.
Il valait donc mieux y aller en douceur…et progressivement.
Comme la sortie de la Porte au Roi est à seulement 700 m de l’esplanade de Fécamp, il est jugé préférable d’éviter le « scandale » d’une nudité affichée de Neptune sortant des eaux s’il y avait des promeneuses ou promeneurs…ce qui se traduira par tee-shirt et pantalon entièrement trempés…
Il y avait en effet encore près de 1,2 mètre d’eau, niveau augmenté par le mouvement de vague.
Mais ce n’était pas tout à fait terminé, car il restait le « Trou au chien », troisième double arcade tout à fait remarquable mais basse. PK 10,90
Infranchissable à pied sec avant les grandes marée basses complètes, et défendu par des parois de roche bombées en vis-à-vis, qui laissent craindre une chute brutale dans l’eau ( Donnée à 9°C le 11 avril) au moindre décrochement de prise, chute aggravée par le râclement corporel sur le rugueux calcaire.
Il valait donc mieux y aller en douceur…et progressivement.
Après une dizaine de mètres de progression agrippé aux bouts de silex ou en cramponnant dans une bonne fissure, il fallut nager quelques brasses avec godillots et sac à dos pour ressortir ! Mais le Dieu Râ étant prodigue, il ne fit pas vraiment froid ensuite, le temps de gagner un grand rocher planté dans les galets permettant de se changer à l’abri de tout regard.
Car au final, il n’y avait personne sur cette grève…totalement interdite d’accès au public, mais cela, on ne le découvre qu’après avoir franchi les grilles et en se retournant !!! PK 12,50
Donc, cet article n’étant pas une incitation à braver les interdictions diverses, lectrices et lecteurs sont ici informé(e)s : grève orientale de Fécamp = légalement inaccessible d’accès…
Mais on peut malgré tout exprimer le regret de voir des interdictions totales primer sur des recommandations appuyées, ces dernières laissant la responsabilité des actes aux citoyens adultes.
D’autant que tout promeneur évoluant sur l’estran à marée basse, dans les bandes médio ou infra littorales n’a pas d’accès visuel aux pancartes. De même pour les plongeurs et les kayakistes et autres padelistes …
D’autant que, statistiquement, le risque d’être victime d’un éboulement se place à 1/50 000 soit au 19 ème rang mondial des risques mortels…, sachant que sur la longueur de la côte d’albâtre, on relève 6 effondrements par an, que leur largeur moyenne est de l’ordre de 50 m et pour une personne marchant à 4 km/h.
Quitte à mourir un jour, on est en droit de préférer que ce soit instantané sous un pan de falaise normande plutôt que suite à l’un des événements suivants :
La 18e cause de mort, une chance sur 51.199, est d’être victime d’une tempête.
La 17e cause de mort, une chance sur 6.174, est la chaleur.
La 16e cause de mort, une chance sur 5.981, est un coup de feu accidentel.
La 15e cause de mort, une chance sur 5.862, est un accident d’avion.
La 14e cause de mort, une chance sur 4.147, est un accident de vélo.
La 13e cause de mort, une chance sur 1.235, est un incendie.
La 12e cause de mort, une chance sur 1.073, est la noyade.
La 11e cause de mort, une chance sur 802, est un accident de moto.
La dixième cause de mort, une chance sur 623, est de se faire renverser en étant piéton.
La neuvième cause de mort, une chance sur 300, est d’être victime d’armes à feu.
La huitième cause de mort, une chance sur 272, est d’être passager d’un véhicule accidenté.
La septième cause de mort, une chance sur 184, est de faire une chute.
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La sixième cause de mort, une chance sur 139, est un empoisonnement accidentel.
La cinquième cause de mort, une chance sur 115, est une blessure auto-infligée.
La quatrième cause de mort, une chance sur 85, est un accident de voiture en tant que conducteur.
La troisième cause de mort, une chance sur 28, un infarctus.
La deuxième cause de mort, une chance sur 7, un cancer.
La première cause de mort, une chance sur 6, une maladie cardiaque !!!
Revenant à la promenade…
Coup d’oeil sur le blockhaus bien particulier à l’angle de l’esplanade, du fait de circulations creusées dans la roche, et mises à découvert par les chutes successives de la paroi en 80 années.
Fécamp a quelques autres atouts architecturaux, heureusement.
C’est un petit port bien actif, et on peut y observer une zone de parc de petits bateaux doté d’un sytème de rangement suspendu et/ou superposé. Le tour du bassin « coûte » 1700 m ! PK 13,10
La suite est moins marquée de surprises et d’obstacles, mais il est presque 16 heures il reste 2h30 de montée soit environ 2,5 m de marge et il faut une heure pour atteindre Yport, à 4500 m de là, mais avec une zone de pied de falaise beaucoup plus facile que précédemment…et dont il faudra bien s’en approcher !
Par sécurité, il y a la possibilité de s’échapper par la Valleuse de Grainval, dans la zone des
sources de la Roche qui Pleure.
Cette dernière est atteinte en 1/2 heure à partir du pont du bassin, en marche soutenue et il apparaît que le talus de galets devrait rester immergé dans sa partie supérieure, même à marée haute (mer très calme !) d’où le pari de passer dans les temps, car il ne reste que 3 km…soit à peine 3/4 d’heure (mais dans les galets, c’est plus difficile !)
Peu de temps sera consacré aux photos de la descente avec le pont et des superbes rondeurs vertes des mousses coiffant ou habillant les chutes d’eau…c’est un choix !
La crique d’Yport ne tarde pas à apparaître car on est presque en ligne droite !
Fin de parcours vers 17 heures, pari gagné mais au mépris des interdictions de raser les falaises ! PK 13,8
Petite visite d’Yport tout en remontant chercher la départementale D 925…l’auto-stop n’est guère facile en milieu urbain…
Et pourtant, il y eut une jeune femme qui, n’ayant pu s’arrêter instantanément, fit demi-tour un peu plus loin et revint sur ses pas pour une prise en charge exprès !
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Et qui, après un peu de conversation, se déroutera pour aller jusqu’au véhicule parqué…comme le ferait un taxi rémunéré !
Quelle chance… que le milieu rural accentue, car une forme de solidarité y est encore bien présente., et dépasse les « craintes » plus ou moins légitimées par la masse des informations alarmistes quotidiennes.
Après reprise du véhicule, il ne reste plus qu’à retourner à Yport où le stationnement est payant un peu partout ou réglementé de telle façon qu’une absence prolongée rend difficile le paiement.
Une jolie place tranquille, sans bruits de circulation, sans trop d’éclairage public, gratuite, fut alors découverte à 1 km de la plage. L’étape du jour prit alors fin ! PK total 19 avec les déambulations citadines et seulement 12 km d’estran couverts… ce qui augure deux étapes à venir plus longues !