Traversée libre au Mont-St-Michel 832
Traversée libre au Mont-St-Michel 832
La traversée pédestre de la Baie du Mont-Saint-Michel est une promenade légendaire depuis au moins un siècle.
Des milliers de marcheuses et marcheurs l’ont réalisée.
Pendant des décennies, cette balade ( terrain plat et 6 km en moyenne soit 1 h à 1h30 sans charge) a été réalisée librement par tout un chacun. Puis, est évidemment apparue la notion de « guidage », d’abord assurée par des bénévoles éventuellement gratifiés d’un « petit billet », mais le développement de l’assistance sportive ou culturelle tous azimuts a très vite fait sentir la manne financière que pouvait représenter le guidage rémunéré, ce qui a amené tout logiquement à un statut de « guide professionnel ».
Quand on observe le tarif standard des adultes et la « jauge » moyenne autorisée, on calcule la traversée (en général A/R 4 à 7 h selon itinéraires, guides et pauses) à…1000 euros par jour ! Plutôt sympathique comme salaire, même si on en déduit ensuite les charges sociales, vu que l’investissement matériel est quasiment nul, et le coût de fonctionnement minimal…
De ce fait, les conditions requises et les « examens » à subir par les candidat à l’attestation préfectorale restant très accessibles, on ne s’étonne pas de dénombrer près de 70 « guides attestés » !
Bien sûr, tous n’ont pas tous les jours une sortie, (météo, creux touristique…) et toutes les sorties ne sont pas au maximum des jauges, mais l’activité est certainement assez rentable.
Jusque là on reste dans la logique de fonctionnement économique de la France, des gens se qualifient, proposent des services rémunérés, payent une TVA des charges et des impôts sur le revenu, et en face on a des client(e)s demandeurs, qui payent et qui repartent le plus souvent satisfaits, tout va bien.
Mais voilà que, soudainement, malgré au moins un siècle de pratique libre sans accident connu ou bien se comptant sur les doigts d’une demi-main par an, la Préfecture de la Manche (Maritime) édite un arrêté (août 2022 selon la presse lue sur Internet) qui interdirait la traversée sans guide attesté… Fichtre !
On est quand même dans le domaine maritine public, et la liberté d’aller et venir sur le territoire est une base fondamentale de notre Constitution.
Cette liberté peut, bien sûr, être restreinte à des lieux, à des périodes, selon certains événements, notamment pour des raisons sécuritaires ou de protection de l’environnement ou du patrimoine.
Mais là ? On le répète : quasiment aucun accident répertorié dans le cas des traversées elles-mêmes. Et pas d’atteinte environnementale.
Divers incidents sont à déplorer, mais ils surviennent tous dans des conditions qui ne sont pas liées aux traversées, souvent des imprudences en tous genres notamment celle de se percher sur les îlots du Couesnon ou de s’attarder sur les rochers au pied du Mont.
Alors, que met-on en avant pour tenter de motiver un tel arrêté, et qui soit recevable ?
Ah ! Les fameux sables mouvants !
Mais étrangement, il se lit partout et les guides le disent eux-mêmes, que ces lises sont rares (il faut même les chercher pour faire les fameuses démonstrations voulues spectaculaires), s’enliser suppose presque de le faire exprès comme ils le démontrent eux-mêmes, et il est physiquement impossible de s’y enfoncer jusqu’à la poitrine.
Par ailleurs, de nombreuses publications écrites ou visuelles montrent que sauf à faire n’importe quoi, on s’en sort très bien seul(e).
Et que sauf stabilisation prolongée, l’éventuelle zone de sable mouvant est tout simplement franchie sans dommage…il suffit de ne pas s’y arrêter !
De fait, le seul vrai risque est de se laisser enfoncer au maximum cependant que la mer est là ou remonte…c’est donc alors la noyade possible.
Les marées « capricieuses »…les vents « violents »…les « nébulosités »… oui, bien sûr, mais ces dangers-là sont potentiellement omniprésents dans tout le domaine marin côtier ! Les pêcheurs à pieds sont tous concernés, partout, mais aussi les pratiquants de toute activité nautique.
Ces critères ne peuvent être retenus, en l’espèce.
En résumé, un individu en bonne santé, qui marche pieds nus ( bottes et surtout chaussures serrées sont un danger si, malgré tout, il y a un enfoncement, car gênent considérablement le dégagement. Les chaussures lâches à la rigueur peuvent être abandonnées à la lise) qui ne se stabilise pas bêtement dès qu’il sent que c’est un peu mou, qui ne s’engage pas à la marée montante, et/ou par temps couvert, et qui sait nager le cas échéant, ne court aucun risque important.
Un tel arrêté concerne donc les gamins immatures, les infirmes, les déficients mentaux, les saoûls ou les drogués, les imbéciles finis, les enfants jeunes, les vieillards, les cardiaques… Il est donc complètement excessif quant à s’adresser à l’ensemble de la population.
Notons tout d’abord qu’une recherche sur internet dans les deux sites préfectoraux (terrestre et maritime) ne fait remonter aucun arrêté d’interdiction de traversée, seuls sont mentionnés et interdits les îlots du Couesnon.
Si on admet que cette interdiction est bel et bien en vigueur, s’en affranchir est passible d’une contravention de 1ère classe si on se réfère au règlement concernant les guides attestés ou non soit 11 euros, c’est à dire deux fois moins cher qu’un passage guidé…
Maintenant, on voit mal comment interdire tout accès à la baie autre qu’une vraie traversée, sans guide, notamment pour les pêcheurs et promeneurs ordinaires !!!
Donc la Préfecture s’est laborieusement embarquée dans une définition de la « traversée » plutôt cocasse… (voir plus bas).
1) Je « traverse » si je vais au Rocher de Tombelaine…donc tout ce qui part entre l’Ouest absolu et le nord n’aboutissant pas à ce rocher, est donc permis…) Bizarre, quand même…tous les dangers sus-dits s’effaceraient donc ??? C’est comique…
2) Je traverse si mon parcours passe par le lit de la Sélune ou de la Sée…Donc si je vais droit à leurs lits, qui ne sont qu’à 400 m du Mont, et que je m’y arrête, tout va bien… faut pas traverser les rivières, c’est tout.
Là encore, tous les risques disparaîtraient…
Si en partant du Mont je vais jusqu’à ces rivières, (5 à 6 km en gros) je ne « traverse » pas non plus, elles en sont à 250 m environ.
Au final, seule la traversée (80 à 100 m avec peu de fond) des chenaux fluviaux serait dangereuse…
Il aurait été plus intelligent de pondre un arrêté qui interdirait la seule traversée des rivières, non ?
En conséquence, on voit bien qu’un tel arrêté n’a de valeur que dans des cas très limités, soit par la météorologie, soit par des marées exceptionnelles, soit du fait d’individus inadaptés à cette traversée, mais alors, tout va être interdit partout, car des inadaptés à ceci ou cela, nous en sommes toutes et tous dans divers domaines !
En conclusion de cet article qui met en relief cette tendance de plus en plus forte à tout interdire pour que des « responsables » soient couverts et /ou pour alléger toute action de secours éventuel , ou encore pour favoriser un commerce local lucratif, nous disons à nos lectrices et lecteurs que sauf accord entier de leur part à payer une telle prestation, il y a le choix d’une résistance soit en restant dans la légalité (on ne va pas à Tombelaine, on ne traverse pas les chenaux de cours d’eau majeurs) soit en la bousculant un peu au rique de tracasserie policière et de payer 11 euros.
Mais, il faut rester régulier avec les guides. Ces dernières et derniers ne se contentent pas de seulement guider les pas, ils savent aussi conseiller (tenue, comportement, technique…) délivrer des connaissances sur la faune et la flore, narrer des anecdotes et des légendes, donner des références historiques, et faire leur bien connue démonstration de dégagement des lises, voire faire expérimenter par un ou deux volontaires…bref, elles et ils sont aussi des animatrices et animateurs, c’est aussi cela qui leur est rémunéré.
Elles ou ils ont aussi quelques connaissances en matière de secourisme et détiennent dans leur havresac des éléments qui peuvent être utiles.
Mais si on se considère suffisamment autonome et équipé(e) et suffisamment mûr(e) pour s’informer et de documenter tout(e) seul(e) point ne sera besoin de guide ni de s’agglutiner à un troupeau gesticulant et bruyant.
Voilà, voilà…chacune et chacun jugera en son for intérieur…