TGRLIFRA 9 A 845
TGRLIFRA 9 A 845


La TGRLIFRA est la Très Grande Randonnée LIttorale FRAnçaise, une promenade pédestre de quelques milliers de kilomètres sur la côte manchoise puis atlantique, avec quelques particularités…
– le parcours suivi est préférentiellement et autant que possible, au plus près du flot, quel que soit le niveau de marée.
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Bien entendu, il peut arriver que des structures artificielles interdisent tout passage pédestre, ou que la marée rende impossible un franchissement durant des heures.
Ou encore, qu’un arrêté municipal, préfectoral, voire ministériel déclare un passage illégal.
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– le randonneur, la randonneuse, sont autonomes, sont donc indépendants de tout commerce, mais susceptibles de quémander de l’eau potable si aucune source ou fontaine n’est accessible durant leurs étapes. Bivouac systématique.
– L’impact écologique est réduit au maximum, donc pas deux véhicules pour les navettes…ouvertes à l’auto-stop ou transports en commun locaux, selon les cas
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– Equipe de 1, 2, 3 ou 4 personnes au maximum.
– étapes calibrées à 25/35 km en moyenne, conditions rustiques, portage minimalisé.
Cette activité ne pouvant être menée en continu (estimation à 100 journées de la Belgique à l’Espagne) car nécessitant une trop importante disponibilité, elle est menée selon un séquençage chiffré, chaque séquence, (Ici la Neuvième : 9) étant composée d’étapes lettrées… (Ici la première : A )


Les points kilométriques maritimes (PKM) sont comptés depuis la frontière belge, en suivant le trait de côte majeur. Il peut donc y avoir des longueurs non parcourues à pied du fait d’obstacles incontournables. Les parcours pédestres sont en kilomètres effectifs, (PK) qui diffèrent régulièrement des PKM du fait d’incursions dans les terres ou dans les villes et villages.
Etape N° 25 9 A : De Portbail à la Pointe d’Agon ( PKM 671 à PKM 709 général)


Après 5 heures et demie de route, je trouve le parking prévu, totalement vide, gratuit, avec toilettes et même éclairé !
En saison, il est agrémenté d’un établissement dit « de bien-être », peut-être pour les clients et clientes, mais assurément pour les tenanciers car leurs services sont tout de même vendus à 60 euros pour une heure !
Nuit tranquille, silencieuse, éclairage public éteint vers 23 heures, il fait 16°C dehors, le duvet n’est même pas utile !.
Lever à Lindbergh vers 5 heures et demie car il faut s’assurer une mer aussi basse que possible pour franchir les fleuves côtiers.
Ne pas les traverser sur l’estran implique de grands détours de contournement.
L’idéal est de les franchir le plus tard possible avant que la mer soit revenue à leur niveau car la retenue d’eau que la marée haute provoque dans leurs cours a pu se déverser au maximum, autorisant une hauteur d’eau minimale à l’estuaire.


Il fait nuit, et il y a un bon vent en pleine face, vent tiède du sud…à 6 Beaufort, soit environ 50 km/h. Le vent siffle, belles vagues, rouleaux bruyants, je marche incliné !
Il y a un clair de lune…la place est ici immense et quasiment horizontale sur 500 à 1500 mètres de largeur et…20 kilomètres de longueur !
Un vent rasant chargé de grains de sable crée des milliers de petits tas pyramidaux en arrière de chaque cailloutis noirs ou bruns, émergeants.


Une grande partie est couverte d’une pellicule d’eau, et en fait ainsi un miroir à perte de vue donnant l’impression de marcher sur de l’eau profonde, cela avec des teintes spéciales qui vont évoluer avec l’« apparition des premières lueurs de l’aurore.
Les nuages servent d’écrans géants aux rouges, mauves, violets… le tout évoluant peu à peu, et le paysage se dévoilant dans toute son étendue. Gigantesque !
Cà et là se rencontrent des coquilles de mollusques, et de nombreux agglomérats d’huîtres arrachés, dont plusieurs individus sont encore bien fermés donc comestibles !


Au PK 04,00, j’atteins la Dure, premier fleuve côtier du jour, dont le cours n’excède pas 10 km ! Très joli havre en forme sagittale et j’applique la méthode du « Déchaussé-Rechaussé » afin d’éviter des chaussures et chaussettes trempées durant toute la journée, qui sera longue… Je suis à Surville. Cette petite opération réclame dix bonnes minutes, dont séchage des pieds avec le haut des chaussettes.


Ces dernières sont choisies exprès très hautes pour donner de quoi essuyer, le séchage de la chaussette après usage s’opérant tout seul grâce à la chaleur corporelle, aux rayonnements du jour, au vent général et à celui généré par le mouvement, et aux contractions du mollet étirant et relâchant la laine… tout une affaire !


Au PK 14,10, après une grande marche rectiligne très ventée où je suis confronté à des nuées sableuses qui rasent le sol, particulièrement fascinantes, à la longue, j’atteins le second fleuve côtier, un peu plus grand, qui est l’Ay, 32 km de cours, et qui débite quand même 1,5 m3 à la seconde ! Il émane d’un grand estuaire, le Havre de Saint-Germain, face auquel on peut voir au large des bouchots à moules. (près de 5 km de parcs cumulés !)


Je renouvelle le « Déchaussé-Rechaussé », avec satisfaction quant au passage à gué, à mi-mollets.
Au PK 21,40 après avoir longé Pirou-plage sur 1200 m de quai, et traversé des parcs à huîtres sur près de 1500 mètres, je rencontre le Ruisseau de Bretteville juste après sa confluence avec le Douit, deux cours d’eau de 9,5 et 7,5 km respectivement.
Par endroits sont acumulées des coquilles, notamment d’amandes de mer marbrées (Glycymeris glycymeris) et de bulots (Buccinum undatum), ainsi que des capsules d’oeufs de raie…mais difficile de dire à laquelle des cinq espèces les plus courante du coin elles appartiennent !


Donc, selon la logique des hydrologues, c’est ce Ruisseau que je devrais traverser avec le troisième « Déchaussé-Rechaussé » de la journée, qui se révèlera impossible car le cours d’eau est canalisé, étroit et trop profond, avec pas mal de vase .
Ce petit fleuve et sa rivière en affluent principal génèrent un grand havre à Geffosse.
Certaines partie de ce littoral ont été « protégées » par diverses défenses contre la mer, notamment d’énormes sacs de toile emplis de sable, qui, hélas, finsissent par se déchirer puis se déliter, engendrant une pollution visuelle et des filaments textiles non biofégradables très préjudiciable à la faune dont les oiseaux qui peuvent s’en étouffer ou se garroter les pattes qui vont se gangréner.


Heureusement, pour diverses raisons, un pont a été construit et d’anciennes vannes permettent de passer au plus court…sinon, c’était un contournement de 5 km !!!
Je repars, avec une mer de plus en plus haute, qui ne permet plus que de voir de la plage, de la plage…sachant que dans cette zone, il y a des bouchots partout, sur près de 8 km² !!! Mais ils sont maintenant sous l’eau.


Cela m’amène au fleuve côtier qui n’est plus traversable facilement et m’oblige à le franchir en entrant dans le Havre de Blainville pour grimper sur le Banc du Sud, avec un « Déchaussé-Rechaussé » et de l’eau à mi-cuisses, le short bien relevé !
Pas bien loin, un pêcheur vient de sortir un bar commun, joli poisson très brillant ! (Dicentrarchus labrax)…


C’était la Rivière du Moulin de Gouville, 12 km de cours, au statut de fleuve côtier ! PK 29,40
Le fameux banc semble à son tour cerné par un cours d’eau, mais ce n’est qu’un collecteur de ruisselets et résurgences mineures, qui se révèle sautable tout près d’une grande passerelle. Ceci m’amène à un chemin pas vraiment public mais praticable sans ennui qui débouche sur une terrasse de restaurant !


Je passe… il n’y avait que peu de clients.
Redescendu sur la plage désormais rétrécie, mais restant encore assez loin de la digue de Coutainville, car le coefficient n’est que de 45, je découvre alors un vilain alignement de maisons sur… 3500 mètres !
Quand on parle de défiguration du paysage, on a une bonne démonstration ici…Mais on échappe encore aux immeubles de plusieurs étages!
En revanche, à quelques exceptions près, ces riverains ont élevé d’horribles murs en béton, alors que des réalisations plus esthétiques et mieux assorties au « paysage », notamment à l’enrochement sous-jacent, auraient pu être imposées par un règlement d’urbanisme. (?)
Mais il y a pire un peu plus loin, avec des poteaux de 4m dont 1,5 dans le sol, plantés sur deux doubles rangées en quinconce, et sur…400 m ! Espacement moyen de 1 m, soit 1600 poteaux ! Beaucoup d’arbres pour un résultat très moche, efficacité restant à prouver.
Heureusement, le spectacle d’une chorégraphie aviaire menée par une bonne centaine de Bécasseaux sanderling (Calidris alba ) trottinant à une vitesse stupéfiante vient me changer les idées !
Ensuite va venir un très long alignement de maisons dont certaines assez originales, avec, là encore, des éléments de protection très bruts, qui ont sans doute fait perdre une part du coup d’oeil que pouvaient avoir initialement ces constructions.
Une plaque commémorative rappelle que ces lieux ont été ceux de violents affrontements, et honore les six personnes ayant rallié le Général de Gaulle en Angleterre en traversant courageusement la Manche Occidentale dans une embarcation légère, et à la rame !


Je poursuis un peu dans les Mielles (carroyage de chemins séparant des dizaines de parcelles pour la plupart encore cultivées, mais promises à une urbanisation progressive).
Arrêt de marche littorale : PK 33,90.
Il s’agit à présent de tenter de regagner une route propice à l’auto-stop, donc sortir de ce village…


En cette saison et ces lieux, la nuit tombe vers 17h30, ce qui réduit la fenêtre favorable à l’auto-stop, il faut s’arrêter plus tôt qu’en été !
Après 2 km dans les rues, je suis miraculeusement chargé par une dame très digne, au PK 36, dans une grosse et belle voiture, qui me fera parcourir 8 km, de précieux kilomètres car me placent sur la bonne départementale !


Peu de temps s’écoule avant d’être chargé par un ex-soixante-huitard qui tutoie tout le monde dès la première seconde et me transportera à nouveau sur 8 km pour un emplacement stratégiquement stoppable ! Je suis à Pirou…


De fait, à nouveau peu d’attente avant d’être chargé par une seconde dame, qui va tenbter de m’expliquer le nouveau trajet imposé par plusieurs travaux publics, et qui compromettent mon plan de route prévu…ce qui est souvent problématique pour un auto-stoppeur quand son extrait de carte routière est dépassé… et me déposer 5 km plus loin sur l’axe de substitution


Attente plus longue cette fois, mais bénéfique car pris en charge par un agriculteur un peu âgé, qui connaît bien le coin, et sait parfaitement comment éviter les blocages et déviations, pour me déposer 22 km plus avant, à un carrefour clé avant Port-Bail…à ce stade, il ne reste plus que 5500 mètres à faire à pied, dans le pire des cas. J’en parcourerai 4 avant d’être chargé par un jeune homme qui m’amènera à ma voiture. PK 40 !

Avec tout de même 43 km réalisés en « stop »…
Il ne reste plus qu’à repartir pour une nuitée proche d’Agon…ce sera à Montmartin-sur-Mer.
Là, découvrant un parcage du véhicule peu conseillé, je me déplace vers Hauteville-sur-Mer juste à côté, et je trouve un bon et beau parking, avec éclairage au-dessus du pare-brise pour dîner.
Pour raison technique, je dois m’adresser à une pizzeria voisine, ce qui me vaudra d’acheter une pizza (pas du tout prévue) à prix réduit avec grosse barquette de frites gratuite ! Ces dernières seront rapidement englouties…

En bleu, marche littorale. 34 km + 2km urbaine
En vert pâle, marche routière 6 km
Autres couleurs, auto-stop. 43 km
