Balade dans le Ruisseau de Malans 814
Balade dans le Ruisseau de Malans 814
Lianchao et Duc attendaient depuis quelques mois qu’un séjour fût possible dans une région où on pourrait réaliser une petite initiation « canyon » pour eux deux…
L’affaire n’était pas si simple, car outre le fait qu’ils puissent dégager plusieurs jours libres communs, il fallait aussi un créneau saisonnier favorable, et, plus contraignant encore, respecter la règlementation spécifique du canyonisme, cette dernière s’intensifiant et se généralisant de plus en plus.
Comme souvent pour les franciliens qui ne disposent pas de longs séjours possibles, le canyon le plus proche et sympathique est celui dit « d’Amondans », bien que le ruisseau générateur actuel soit celui de la commune de Malans, et que le cours de cette petite rivière soit aussi partagé avec la commune de Lizine…Les trois étant d’ailleurs désormais réunis en une communauté de commune « Loue-Lison » !
C’est donc dans le Ruisseau de Malans que nous allons évoluer, canyonnisme autorisé dès le 15 juin…et nous sommes le 22 !
Compte tenu du très faible niveau de précipitations local depuis plusieurs semaines, le ruisseau coule assez faiblement, nous l’avons constaté au passage de la route au-dessus de lui.
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On pourrait presque pratiquer sans combinaison… d’autant qu’il fait bien chaud dehors, mais ce n’est pas l’objectif ici, nous nous équipons donc « pour de vrai », tenue complète.
Pour SJV, « complète » signifie équipement spéléologique intégral complété d’une combinaison néoprène intégrale elle aussi.
Autant dire une sorte d’armure !
Si cela prête à sourire certains observateurs, on peut leur répondre que grâce à cet équipement (suréquipement, d’un point de vue général partagé) nos combinaisons néoprènes restent intactes, plusieurs ayant déjà…40 ans !
Quel club canyoniste pourrait en dire autant de son matériel « néoprène » y compris utilisé en spéléologie ?
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Nous voilà donc à nous équiper, et cette séquence de l’activité a toujours été la plus délicate à vivre, et même pour certain(e)s la plus énergivore, presque désagréable !
Mais c’est fait, et bien fait, et, heureusement, la marche d’approche est une descente continue et courte ( 200 m à peine) qui nous voit rapidement vautrés dans le lit du ruisseau là où un peu de profondeur permet une immersion allongée.
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Par habitude et aussi par respect du milieu naturel, nous allons évoluer en marchant sur les parties sèches du lit.
Cette partie est parsemée d’arbres et de branches tombés depuis des années déjà, et il s’y forme une végétation opportuniste et colonisatrice, de lierre, de fougères, de mousses diverses, et bien sûr, de lichens, qui donnent peu à peu un aspect de jungle très sauvageonne !
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Il faut donc passer par-dessus, par-dessous, toute en effectuant régulièrement des immersions pour rafraîchir nos corps et les accoutumer au bain d’eau froide, quelques passages en bassines étant attendus pas bien loin.
Duc et Lianchao s’en accommodent bien, avec quelques cris et rires de défoulement bien rituels !
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On avance de plus en plus dans un profil géologique caractéristique du canyon académique, avec des formes d’érosion et de corrosion, un lit de plus en plus creusé, des parois de plus en plus relevées et rapprochées.
Des bassines, des marmites, beaucoup de blocs de roche roulée, et de nombreux embâcles de volumes variables, certains appuyés sur d’énormes troncs.
Le débit étant faible, on peut rencontrer des zones d’eau presque stagnante où flottent des tapis de feuilles et de bouts de bois divers, peu engageants à la baignade…et que nous évitons au mieux, bien que bardés de tissus isolants.
L’aspect devient franchement romantique, offrant une vision idéaliste, avec une enfilade de creux et bosses méandrique , la roche claire semée de verdure et les lierres en rideaux, musicalisé par les oiseaux et les clapotis de l’eau miroitante… Ce canyon en ce jour paisible (mais il peut devenir très agité voire violent) pousse à la rêverie poétique !
Duc et Lianchao sont sensibles à ces décors sauvages accueillants, apaisants, et quelque peu hors du monde !
On franchit alors un élargissement ceint de hautes falaises elles-mêmes creusées de grottes sur plusieurs niveaux, surmontées d’arbres penchés, avec la palette de verts d’une grande vasque d’eau à nos pieds…
Après quelques minutes de contemplation, on poursuit en franchissant de gros troncs encastrés les uns dans les autres puis une longue « bassine » où il faudra nager quelques mètres, avec bonheur, car l’air est bien chaud, même au creux de cette profonde gorge.
Plusieurs marmites et petits ressauts s’ensuivent alors, où l’on peut s’amuser à de courtes mais néanmoins prudentes glissades, pour arriver au sommet de la première cascade.
En cet endroit, on domine une très large cuvette enserrée dans un cirque très ouvert sur l’aval, tout à fait étonnant !
La cascade elle-même n’est que d’une hauteur modeste (4 m environ) et seulement très déclive, d’aucuns la descendent avec une simple corde tenue en main, voire en désescalade quand la roche n’est pas glissante, grâce à de vagues marches creusées sur son flanc gauche.
Mais pour nous, ce sera avec un bel équipement cordé, et en révisant bien gestes et positions, car les deux crans de descente qui suivront seront un peu plus sérieux…
Lianchao et Duc se débrouillent donc tous les deux, n’étant que supervisés de loin ! Et tout se passe fort bien.
On reprend alors la dernière longueur avant le grand virage et les verticales, pour constater que les tronçonneuses ont récemment travaillé ! Les principaux obstacles et embâcles ont en effet été partiellement éliminés, ce qui va faciliter notre avancée dans une gorge devenue bien plus large.
Le seuil de la première cascade a été rééquipé voici quelques années, et ce sont maintenant deux paires de broches à main droite qui ont supplanté le relais chaîné et la petite cheville anciennement à main gauche, mais qui persistent encore.
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Cela crée un fractionnement mais à passer avec les pieds sur la roche, assez facile tant qu’il n’y a pas un gros débit.
Il n’y a que quelques mètres rebondis, avec une cavité inférieure qui complique un petit peu les appuis, mais Lianchao s’en tire très bien, rapidement suivie en cela par Duc.
On passe alors au « clou » de la course, avec une vingtaine de mètres à déniveler, en deux crans, le second très pentu.
L’équipement est simple, et, en l’absence de la grosse gerbe d’eau qu’il peut y avoir d’ordinaire, on peut aller jusqu’au relais principal sans descendeur, la longe suffisant.
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Ce relais est plaisamment situé sous un rebond, avec une bonne et large assiette pour les pieds, au point que l’on peut s’y tenir à deux, voire trois.
En revanche, il est impossible de voir le bas de cascade, donc d’ajuster exactement le bout de corde au ras de l’eau comme il se doit de le placer, ce qui sera donc réalisé « au jugé » !
Cette descente, d’une quinzaine de mètres, sur une pente progressivement raide, face à un superbe paysage, et que l’on peut faire ce jour-là sans se préoccuper du flot taquin qui, en débit moyen (ou fort) provoque de grosses giclures sur les bottes et tend à chasser les pieds, cette descente est vraiment plaisante !
Reste à finir dans l’eau d’une grande vasque profonde, et où l’on constatera que la corde est un petit peu trop longue !
Un petit mètre de trop qu’il faut expulser du descendeur, qui n’est pas ici un « huit » mais un « S-Stop », moins facile et moins rapide à dégager, mais ici et aujourd’hui, il n’y a nul besoin d’aller vite !
Lianchao hésite à traverser à la nage, mais finira par s’y résoudre sous une forme dorsale flottante propulsée par un tiers…
Duc avale tout cela avec aisance, et nous rejoint…la course en descente est quasiment terminée.
Quelques photographies s’imposent alors !
Une tentative de remontée par le haut de berge droite sera abandonnée ayant jugé trop risqué de s’aventurer dans la pente ébouleuse, les granules de terre, feuilles mortes et moult petites brindilles et branchettes sèches formant des tapis roulants propres aux dérapages incontrôlés, et nous n’avons pas de corde d’assurance…
Mais tout cela avait été envisagé et l’équipement fait pour autoriser la remontée sur corde, dans un style spéléologique !
Nous revenons donc au grand bassin, et entamons la remontée aux bloqueurs et pédale, que Duc et Lianchao vont effectuer de main et pied de maître !
Pendant que Duc remonte la seconde cascade, l’équipement inférieur est démonté, et Lianchao passera par le chemin des marcheurs-grimpeurs pour rejoindre le seuil.
Nouveau démontage, petite discussion constructive avec un père et son fils qui se promènent par-là, rangement et nous remontons par le chemin de rive droite, jusqu’à la petite cascade où nous attend pendante, la jolie corde verte qui va permettre sa remontée, même si cela serait faisable sans elle (difficile et pas garanti pour les gens « ordinaires » !)
Cette phase ne sera qu’une formalité, et il ne reste plus qu’à gravir les multiples petits ressauts, certains malcommodes mais d’autant plus amusants ! Un peu d’entraide sera bienvenue, certaines fois…
Duc se charge du sac, en alternance, et le portera dans la grande pente finale qui va du ruisseau au chemin de La Trappe, soit 25 m à déniveler…sac bien chargé de 50 mètres de corde mouillée et tous les matériels individuels devenus inutiles à porter sur soi, complété du bidon de sécurité, sangles et mousquetons…un bon petit poids !
Mais ce n’est pas fini pour autant…
Il y a encore à se déséquiper totalement, ce qui exige encore quelques efforts, puis étaler le tout pour égouttage, puis tout ranger en sacs et enfin charger la voiture, une petite heure y passera presque ! (sans se presser s’entendant)
Nous avons deux heures de route prévues ce soir pour rallier Lecey et son lac près de Langres
Et un bivouac agreste à la belle étoile pure…qu’un beau chemin agricole herbu bien propre va nous permettre en toute tranquillité…même pas de moustiques ! Il n’y a plus qu’à dormir…
Balise orange = stationnement du véhicule hors chemin agricole de La Trappe
Balise bleue = accès au ruisseau, bassinage initial.
Cote 367 = confluence du ruisseau intermittent formant cascade à main gauche
Balise mauve = petite cascade 4 m et cirque rocheux
Balise rouge = première cascade 5 à 6 m
Balise noire = cascade de 20 m en deux crans
Balise en bleu clair = bassin final (sauts possibles des berges).