L’art des mains courantes cordées 234

L’art des mains courantes cordées 234

22 octobre 2019 Canyon Spéléologie 0

L’art des mains courantes cordées…sans courir !

Les mains courantes sont le plus souvent constituées d’une corde d’assurance, de câbles ou de « fils clairs », parfois de chaînes, et on les rencontre lorsque l’on est face à un risque de chute ou pour éviter une immersion aquatique ou encore des lacs de boue épaisse,  cela en progression horizontale ou oblique. 
Elles sont là pour franchir l’obstacle ou affronter la difficulté plus facilement et/ou en toute sécurité soit en s’y maintenant avec une ou deux mains, soit en s’y longeant (en plus) s’il y a un risque notoire. L’agrès se situe le plus souvent entre 1 et 1,5 m, parfois plus haut, et les bonnes mains courantes, qu’elles soient en palier, en talus ou en vire sans prise ou presque, sont généralement bien tendues, sauf si cela génère des frottements importants et répétitifs.

L’usage décrit ici s’applique principalement à la spéléologie, mais se rencontre aussi en canyonisme, çà et là…

Dans cet article, on laissera de côté les mains courantes métalliques, qui sont de plus en plus rares, et relèvent d’une technique spécifique. Elle seront traitées dans un autre article

Les mains courantes cordées : 
Concernant les équipeurs, qu’il s’agisse d’équiper en fixe ou seulement pour la course de l’équipe du jour :

  1. Ces agrès, s’ils sont bien tendus, voire trop bien tendus, peuvent subir et faire subir des tensions très importantes lorsque le poids des personnes va s’appliquer sur eux. On évitera donc les cordes fines et, a fortiori, les cordelettes.
    La corde de 9 mm de diamètre paraît être la limite raisonnable, même si, pour des raisons liées au poids et au volume on aimerait réduire les choses pour les mains courantes éphémères. Pour les fixes, les durables, qui servent à tout le monde, plus la corde sera forte et résistante à l’abrasion, et mieux ça vaudra…
  2. Les deux extrémités doivent être amarrées irréprochablement. Cela suppose soit un amarrage à la corde directe sur un support lui-même irréprochable (solide, durable, non-abrasif…), soit un double voire triple amarrage comme pour les têtes de puits.
  3. Les nœuds d’extrémité qui semblent les meilleurs à l’usage (mais ce n’est pas exhaustif) sont soit deux nœuds de huit sur ganse successifs, soit un « Mickey », ou encore un  noeud de Fusion ou un noeud de chaise double ganse coiffée.
  4. les nœuds intermédiaires les plus fréquemment réalisés sont le noeud de huit sur très courte ganse, le noeud de batelier (mal nommé « Cabestan »)  qui permet les réglages de longueurs et tensions avec finesse, et le noeud papillon qui, lui, permet d’ajuster la géométrie générale, notamment la hauteur quasi-constante de la corde, avec un autre avantage important qui est de positionner « spontanément » les brins opposés selon un même axe au lieu de leur imposer une torsion pour y parvenir. 
  5. Concernant le Batelier, signalons qu’une fois bien serré il n’est pas aisé de le démonter en place, ce qui peut poser des problèmes pour déséquiper
  6. Deux nœuds économique, rapides et faciles à faire comme à défaire, et facilitant les réglages, sont le noeud Polonais et le noeud Russe, bien qu’ils aient, comme le Batelier, l’inconvénient d’encombrer les mousquetons ( plusieurs tours de corde à y passer), et de n’être guère adaptés aux maillons rapides.
  7. Penser que cette main courante est censée pouvoir être franchie dans les deux sens, ce qui implique des positionnements d’amarrages bien réfléchis.
  8. Les amarrages intermédiaires ne doivent pas être trop distants, faute de quoi la main courante va créer des pentes importantes, ce qui engendre des passages potentiellement brutaux dans la partie descendante, et gourmands en énergie dans les parties remontantes, ou bien peuvent nécessiter sans cesse des appuis sur pédale, donc des manœuvres chronophages, et des difficultés voire stress aux débutants.
  9. Ces mêmes amarrages gagnent à être choisis là où on trouve des appuis de pieds, et bien sûr, sans dévers négatif autant que possible.
  10. Ne pas hésiter, sauf si l’économie de corde est une priorité, à confectionner des pédales de passage en laissant de longues boucles pédalières sous les amarrages critiques, qui sont de précieuses aides à la progression. A ce sujet, un « Mickey » très asymétrique peut se révéler intéressant…et original !
  11. Du fait de l’encombrement et de la rigidité potentielle des mousquetons d’amarrage, (et pire encore, des maillons rapides, Presto, mini-Faders, et autres petits connecteurs…) il peut être vraiment agréable pour les usagers de trouver un second mousqueton dans le premier, facilitant leur mousquetonnage de loges et/ou de pédale…ceci aux passages difficiles.
  12. L’équipeur peut œuvrer en étant assuré sur une poignée ou bloqueur longés en constante tension ou presque, mais cette méthode implique de ne pas chuter violemment, et d’avoir la corde tendue en permanence en amont du bloqueur. Elle implique aussi de devoir démettre et remettre l’assurance sur corde à chaque passage d’amarrage. 
    De tout cela, il ressort que s’assurer sur descendeur est bien plus efficace tout en restant plus sécuritaire, sachant que la bonne façon de s’assurer sur cet appareil n’est pas d’y faire des clés mais de faire un noeud de vache quelques centimètres en aval du frein ou équivalent. 
    En effet, le descendeur n’est jamais retiré de la corde, donc l’assurance est constante. En cas de chute, il y a un amortissement, le descendeur n’est pas détérioré, et la gaine de la corde n’est pas dégradée par des picots de bloqueur. Il y a bien moins de manœuvres. Les ajustements pour se positionner sont plus faciles et plus précis, moins fatigants. Tout cela étant encore plus vrai avec un descendeur « Stop », même si ce dernier n’exonère pas l’équipeur de faire un noeud en aval, par prudence…le « Stop » n’étant pas un appareil à risque zéro.

Concernant les usagers…

 

 

  1. Comme toujours et surtout ici, se longer par en-dessous, pour avoir le doigt des mousquetons vers soi, bien contrôlables et ne pouvant s’entrouvrir en cas de chute contre une protubérance de la paroi, ceci réduisant considérablement leur résistance au choc et à la charge.
  2. User de la longe courte et, si utile, de la longe longue repliée en deux avec un mousqueton supplémentaire au pli, ce qui en fait finalement une longe très courte !
  3. dans certains cas, il peut être bénéfique de se doter d’une chaînette de trois mousquetons ou d’une dégaine d’escalade, passée dans le MAVC, créant une troisième longe…de moins de 30 cm. L’intérêt de ces longes raccourcies étant d’éviter de se retrouver suspendu à bout de grande longe, le rétablissement exigeant beaucoup de force, et même parfois impossible à ceux et celles dont les bras tendus ne parviendront pas à permettre la remontée du corps si les pieds ne trouvent pas de bons appuis…et les « malheureux(ses) restent suspendu(e)s, ou s’épuisent, ou devront mettre la poignée-pédale en oeuvre…     
  4. Préventivement, utiliser la pédale seule mousquetonnée sur la corde ou les amarrages selon les cas, ou bien utiliser la poignée-pédale sur la corde, en veillant à bien prendre la corde avec un mousqueton à la base de la poignée (ou du bloqueur de poing) pour éviter leur basculement perpendiculaire à la corde en cas de chute ou traction forte…ils sont faits pour travailler longitudinalement !
  5. Progresser avec régularité, à son rythme, dès que ces mains courantes s’avèrent longues ou multiples, et/ou pauvres en appuis de pieds .
  6. Lorsque des sacs sont aussi du voyage, ne pas les garder sur le dos est franchement recommandé, sauf si le contraire s’avère être une nécessité de franchissement. On peut évidemment les garder à la ceinture, mais rien n’interdit de les suspendre à la main courante et de les faire progresser en coulissant sur elle. On s’en trouve allégé et bien plus à l’aise dans ses mouvements. Bien sûr il y a un prix à payer : devoir leur faire passer chaque amarrage.
    Si ceci coûte aussi des efforts, ils sont généralement bien moindres que devoir les porter en permanence. De plus, les passages peuvent être exécutés entre équipiers, ce qui répartis tâches et dépenses énergétiques, et crée de l’entraide solidaire. On ne négligera pas, bien sûr, le risque de perdre un sac au moment du passage…ceci est aisément contrecarré soit en assurant le passage avec une longe inutilisée à cet instant, soit en ayant un mousqueton sur le sac et un autre sur la longe du sac…il y a alors le même principe technique que celui de la double longe des personnes.
  7. Sauf s’il s’agit d’intervenir auprès d’une personne, éviter d’être deux sur le même tronçon de corde…car en plus de la gêne mutuelle, s’ajoute une double charge donc une double tension sur les amarrages…
  8. Dans les parcours prolongés, si les bras fatiguent, les laisser pendre quelques secondes puis les tendre vers le ciel quelques secondes, recommencer cela  deux ou trois fois, en « pianotant » avec les doigts pour faire travailler en douceur les muscles des avant-bras. Cet ensemble d’actions permet au sang vicié d’être éliminé et remplacé par du sang oxygéné.

 

L’ensemble de ces conseils et d’autres qui se trouveront bienvenus d’ailleurs, devraient permettre d’aborder les mains courantes avec  confiance et dans la sérénité…mais, pour autant, on ne dit pas que ça sera forcément une partie de plaisir !!!
Nos grottes savent se faire mériter…les mains courantes peuvent se révéler être des épreuves artistiques !

 

 

Ci-contre, une main courante particulièrement soignée, uniquement sécuritaire, et dont les nœuds sont sous fourreaux anti-abrasion, avec des boucles de franchissement. Chapeau !
Destinée ici à sécuriser lorsque le débit de l’eau est important.

.

 fois

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *