Les piliers à bras des carrières 712

Les piliers à bras des carrières 712

12 décembre 2023 carrières diverses 0

Les piliers à bras des carrières        712

Quasiment toutes les carrières souterraines franciliennes, et probablement aussi celles d’autres régions, nécessitent des soutiens, des soutènements, pour sécuriser le toit des galeries.
Ces éléments sécuritaires fondamentaux peuvent être distingués selon sept catégories, les plus souvent rencontrées :
– les piliers tournés, qui sont de la roche en place, leur forme de pilier apparaissant lorsque l’exploitation contourne une masse qui se trouve alors détachée de la strate. Ces formes sont plus ou moins régulières et de dimensions variables, selon la nature de la roche, sa fracturation naturelle, et la masse de roches supportée, la présence d’eau…etc.
– les poteaux de bois souvent par deux accompagnés d’une poutre transversale
– les soutènement maçonnés, utilisant des blocs de formes quelconques, des blocs taillés, des parpaings, des briques pleines…ou en béton banché.

 

Ils peuvent être des murs ou des voûtes.
– les hagues avec ou sans bourrage
– les étançons d’acier ajustables et autres structures métalliques arc-boutées
– les tumuli de déchets, faits d’un mélange grossier de sable, gravier, granulats, petits blocs, formant un tas volumineux, qui n’empêchent pas le décollement du toit mais en limitent la hauteur de descente.
– Les piliers à bras, constitués de blocs empilés, le plus souvent à sec, parfois montés au mortier.

C’est de ces derniers que traite cet article.
Ils sont sans doute les formes les plus anciennes de soutènement.
Ils ne nécessitent en effet aucun apport de l’extérieur, la matière étant sur place.
Ils mettent en œuvre des blocs qui, le plus souvent, n’offrent pas d’intérêt technique ou commercial, ce qui permet une utilisation rationnelle des rejets de taille dont l’élimination coûte un temps de travail.
Ils n’appellent aucun constituant annexe (mortier) et sont donc très rapidement construits, immédiatement fonctionnels, et sont très économiques.
Ils ne réclament pas une manœuvre qualifiée, seul le contremaître supervisant la réalisation devant avoir la compétence requise.

 

Ces piliers dits « à bras » sont donc, en théorie, bâtis à la force des bras, pour rassembler les blocs voulus et les superposer.
En théorie, car nombre de piliers comportent des blocs volumineux, pas seulement à la base, et peuvent peser 100, 200 kilos, voire bien davantage.
Pour ceux-là, les seuls bras ne suffisent pas, même très vigoureux, même appartenant à plusieurs hommes en équipe.

 

 

Il peut alors être nécessaire d’utiliser des méthodes ancestrales à base de madriers en plan incliné et avec un treuil mécanique, ou à base de pinces-leviers avec lesquelles on élève verticalement des blocs, peu à peu, pour les riper une fois la hauteur voulue est atteinte.

Leurs formes sont assez intéressantes. Dans bien des cas, on peut douter de leur efficacité réelle si le ciel de carrière venait vraiment à fléchir…

 

Lorsqu’on les trouve actuellement, ils ont souvent plus d’un siècle d’existence, et sans aucune maintenance depuis des décennies, et leur instabilité, leur géométrie parfois aberrante, permettent de douter de la sécurité censée être assurée !!!
Quelles sont donc ces formes typiques ?

– Piliers parallélépipédiques ou cylindriques.
Comme leur nom l’indiquent, ils sont des prismes droits, à base carrée, discoïdale ou rectangulaire. Leurs dimensions peuvent être impressionnantes, se comptant en mètres voire décamètres. Très souvent constitués d’un agencement très étudié de nombreux petits ou moyens blocs, sans liant.
Leur largeur fait qu’ils sont fréquemment à cheval sur une diaclase importante, soutenant largement chaque compartiment de la strate, leur longueur s’étirant grosso-modo selon le tracé de cette diaclase.

Montage entièrement manuel, ajustement au ciel avec des roches dures (calcaire siliceux, grès…) ou avec des cales de bois en biseau (du chêne). Très longs à édifier !

 

– Piliers columnaires.
Ils sont un empilement sur une seule colonne, généralement partant d’un gros bloc puis allant en décroissant. Souvent plusieurs à peu de distance.
Soutiennent des compartiments de petites diaclases ou bien une strate fragile ayant une tendance au décollement, même si elle ne paraît pas diaclasée. Notamment les strates marneuses. La forme de la colonne est alors grossièrement conique.

 

 

 

 

– Piliers simples massifs
Comme les columnaires, il n’y a  qu’une pile, mais de section à peu près constante, constituée de gros blocs empilés, la section restant à peu près constante. Ce sont typiquement ceux qui nécessitent des éléments de manœuvre pour amener les gros blocs supérieurs.

Ils sont très souvent plusieurs dans les parties élargies des galeries, dites « salles ».

 

 

 

 

-Piliers jumelés
Ce sont des simples, presque toujours columnaires, placés de part et d’autre d’une diaclase.
Lorsque des piliers sont de faible hauteur, on parle de « cales à bras ».

 

 

 

 

 

-Piliers confortés
Ce sont des simples contre lesquels les carriers entassent un mélange de poudre de calcaire, d’éclats, et de petits blocs, le tas pouvant remonter plus ou moins haut, et les consolidant, évitant ou limitant une éventuelle inclinaison sous la pression du toit
Ce confortement, en cas de défaillance du pilier, prend alors le rôle de tumulus de retenue, limitant l’effondrement.

 

 

-Piliers de hagues
Ce sont généralement des simples massifs, assurant l’essentiel du soutènement, puis reliés entre eux par des hagues, avec ou sans bourrage en arrière.
On arrive alors à la consolidation de carrière la plus efficace, la plus stable, la plus durable, et qui permet le recyclage du plus gros des rejets d’exploitation, à moindres frais.

 

 

 

L’évolution de ces piliers peut fournir d’importants renseignements quant au comportement de l’exploitation.
Si le toit a eu tendance à descendre et si la strate est épaisse, les blocs supérieurs et parfois ceux du dessous ont été soumis à une forte pression, souvent supérieure à leur résistance mécanique, et on les voit craquelés.

 

Si ce désordre reste mineur, le soutènement est maintenu. Dans le cas contraire, c’est un effondrement très probable qui va suivre.
Dans d’autres cas, si la descente de toit est très lente et limitée, on peut voir des piliers se déformer de façon « plastique », se courbant ou s’inclinant, ce dernier cas souvent lié à un déplacement du bloc de toit, les grandes diaclases faisant jouer les compartiments entre eux.

Quand les piliers sont faits de gypse ou de calcaire fragile, les blocs peuvent s’auto-dégrader, notamment à cause de l’eau de ruissellement, de condensation, d’inondation, connaissant alors une lente décomposition par dissolution.

Inversement, et bien plus rare, il peut arriver que le ciel de carrière s’élève ou que le « mur » (c’est à dire le sol) s’affaisse sous le poids du pilier.
Le pilier se disjoint alors du toit, il n’est pas rare alors qu’une partie sommitale tombe d’elle-même, car n’étant plus serrée par le coincement.
Ceci peut aussi arriver dans le cas d’un calage en bois car ce dernier finit aussi par se décomposer sous l’action conjointe des moisissures et des bactéries…il apparaît alors une zone de faiblesse voire un « jour » entre le sommet du pilier et le ciel de carrière.

Il n’est pas rare de rencontrer un pilier à bras disloqué…et si le ciel de carrière n’est pas tombé pour autant, il y a tout lieu de s’en méfier !!!
Ne pas se risquer à faire tomber un pilier en place, le pire pouvant alors survenir instantanément.
En cas de chute accidentelle se déclarant, se réfugier aussitôt vers une zone paraissant sûre. Bien que nul endroit ne puisse être considéré comme sans aucune dangerosité, raser les parois peut être salvateur car il est clair que le décollement du ciel commencera par là où il était soutenu, avec un mouvement de basculement…

 

 

… soit la plaque de strate est fissurée et le décollement peut rester partiel, éloigné des parois, soit le décollement est total, avec une fracture au ras de la paroi, et on a une petite chance que la plaque forme un « toit », en appui sur la paroi, ménageant un espace viable..
Mais nous ne souhaitons à personne de connaître un tel incident…car les chances d’en sortir indemne sont minces !

Enfin, au-delà de ces aspects techniques, ces piliers témoignent de siècles de travail dans de difficiles conditions pour des milliers d’ouvriers,ils peuvent aussi créer des images, des paysages, des compositions artistiques, et prendre un peu de temps pour mieux les regarder peut être enrichissant…

 

 

 

 

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