Descente de l’Epte : Sérifontaine-Dangu 692

Descente de l’Epte : Sérifontaine-Dangu 692

5 octobre 2023 Canoë 0

Descente de l’Epte : Sérifontaine-Dangu            692

Bien que modeste avec ses 112 km de cours , 180 m ( 1,8 mm/mètre en moyenne) de dénivelée et environ 10 m3/seconde de débit moyen, cette rivière est très connue pour son rôle historique de frontière géographique entre la Normandie et le Royaume de France, de l’an 911 à l’annexion de la Normandie en 1204, mais aussi grâce à la célébrité du peintre Claude Monet et sa propriété de Giverny.
Le rôle frontalier a généré la construction de nombreux châteaux et autres places fortes, de part et d’autre de sa vallée.

De plus, comme tout cours d’eau régulier de bon débit, l’Epte est semée de moulins, aujourd’hui inactifs et plus ou moins conservés.

 

Conventionnellement, cette rivière est considérée navigable en canoë à partir de Gournay-en-Bray, pour 73 km jusqu’à la Seine.
Commercialement, cette navigation ludico-sportive s’est peu à peu installée, de Dangu à Giverny soit 34 km. (il reste alors environ 3 km pour atteindre la Seine)

Il y a donc une petite quarantaine de kilomètres très peu parcourus de Gournay à Dangu, et il n’en fallait pas plus pour déclencher une idée de sortie exploratrice dans les esprits SJViens…

 

Ce genre de « reconnaissance » de parcours, nous y sommes habitués, comporte évidemment une part d’inconnu, une part d’aventure, une part de risque, une part d’efforts, et demande du temps libre… Une journée y est vite déroulée !
En toute logique elle est menée en tout petit nombre, et avec des échappatoires repérées.

 

 

Si 40 km de descente ne réclameraient, en navigation « normale » que 6 heures, pour ce type de rivière de plaine, nous convenons de n’en parcourir que 20 dans le même temps, ce qui est souvent observé…on va deux fois moins vite !

 

 

Section du jour : Sérifontaine à Dangu, 20 kilomètres. A première vue, 30 obstacles artificiels potentiels, qu’il s’agisse de ponts, de passerelles, de barrages, de vannages… Auxquels s’ajouteront probablement des obstacles naturels, arbres tombés, embâcles, rochers, « maigres »,…

 

 

Il y a déjà une centaine de kilomètres en voiture pour atteindre le village de Sérifontaine.
Embarquement très difficile au pont de la D102e, mieux vaut tenter l’affaire au petit pont latéral de la D 17, 300 m plus en aval, ce qui amène à embarquer sur un petit bras de délestage du cours principal qui traversait naguère une grande usine métallurgique désormais disparue, remplacée par une actuelle petite zone d’activité commerciale et une future petite centrale photovoltaïque.

 

Il n’est pas possible de décrire et situer les nombreux passages « maigres », ces derniers variant régulièrement et dépendant du débit, lequel varie du simple au double entre le début du printemps et la fin de l’été !!!.

Hormis les ponts successifs dans Gisors, tous les ponts et toutes les passerelles laissent un tirant d’air suffisant pour passer en navigant, pour un débit faible à moyen. Par gros débit, il faut s’en méfier pour certain(e)s.
Dans Gisors, un kilomètre superbe, contexte urbain agréable, rivière propre et transparente tapissée de plantes aquatiques d’un beau vert…enjambée par une suite de ponts de pierre voûtés et fleuris, une petite Venise !

MAIS…Plusieurs d’entre eux sont bas, très bas, le pire étant la couverture bétonnée soutenant un grand rond-point, sur près de 50 mètres de rivière.
Le luxe aura été de laisser un grand « œil » ouvert sur l’Epte, au cœur du Rond-Point !

 

En revanche, c’est très bas, avec un peu plus de marge en rive gauche. Peut devenir infranchissable si le niveau de l’eau est élevé.
Nous avons cependant rencontré  des passages « infranchissables » ou difficiles voire dangereux si mal appréhendés…

  1. A 3500 m environ, au lieu-dit « Droitecour », on trouve (ou plutôt on entend) un large déversoir bas en rive droite, infranchissable sans débarquer. Tout droit, on bute sur une grille de rivière très serrée, quasi-bouchée, avec un déversoir de trop-plein à 90° sur la droite.

Passage   Droitecour (pointillés )

 

 

 

 

 

Il donne sur un ancien vannage, laissant actuellement un passage actif avec un petit seuil, environ 1,2 m de largeur et 1 m de hauteur, franchissable ou non selon le débit et son possible encombrement. Quelques ronces pendantes pour  agrémenter l’affaire…Vérifications indispensables !
Si le passage paraît trop incertain, revenir en arrière et passer en transbordant au niveau du déversoir amont…on trouve alors une sorte de petit lac sauvage.

 

Environ 5000 m plus loin, on atteint l’Usine pharmaceutique Amphastar, près d’Eragny-sur-Epte. Dite « Usine Saint-Charles ». (PK 8,5 )
Obligation de partir sur la droite, dans un petit bras assez dynamique, qui mène droit à un vannage ancien, dégradé.

 

Stopper avant…
Reconnaître ce passage est indispensable. Aller tout droit ou partir à 90° dans la première vanne est à choisir selon conditions du moment !
La vanne bien en face nous semble bien préférable avec sa pente inclinée régulière. Selon débit, là encore.
Largeur environ  1 mètre, hauteur 1,2 m bon remous derrière, ronces bordant le mur de rive gauche, c’est donc à négocier en évitant d’être dévié par le courant partant vers les vannes de droite, en rangeant bien les pagaies et la tête et en s’activant immédiatement après le franchissement.
Si trop problématique, transborder en amont des vannes, en rive droite.

 

Gisors…12 Ponts !

Arrivant sur Gisors, (PK 11 environ) le canal de dérivation et de régulation est barré par une grosse vanne infranchissable sans débarquer.

 

 

La navigation sur cette voie annexe n’a pas été testée…elle dépend évidemment du flot lâché par la vanne.

 

 

Partant à gauche dans le cours « naturel » (mais soigneusement bordé !) on atteint Gisors où pas moins de 12 ponts et passerelles intra-muros nous attendent. La navigation se déroule alors entre deux hautes berges verticales, invisible de la ville sauf pour les badauds accoudés aux garde-corps des rives et des ponts.
Gisors mérite un arrêt touristique, dont imposant château, remarquable église, ancien lavoir au fil de l’eau, bâtisses diverses à colombages, entre autres…
ATTENTION ! Il n’y a aucune interdiction du canotage intra-muros, mais c’est sans doute parce que personne ou presque ne le pratique !
Du fait de la problématique posée par la « Chute de Gisors », un telle activité qui deviendrait plus fréquente déclencherait certainement une interdiction très vite placardée partout (comme l’est déjà celle de la pêche), au motif de sécurité publique. (Qu’on ne pourrait nier ni renier)
De plus, la beauté des herbiers ondulants sur toute la longueur et toute la largeur du cours d’eau doit être sauvegardée…on évitera donc soigneusement de pagayer, ne gardant que la fonction « gouvernail », afin de ne pas abîmer la flore…le courant suffisant à une progression correcte.
Ce pourrait être un second motif, louable, pour la municipalité de poser une interdiction de naviguer, car une fréquentation régulière aurait tôt fait de détruire tout cela au moins en partie…
Donc, aux lectrices et lecteurs qui seraient tentés de passer par là, nous disons : GRANDE DISCRETION, RAPIDITE du passage, GRANDE ATTENTION aux herbiers.

Au 11ème pont ou passerelle, qui se place au niveau de la grande église Saint-Gervais, on aperçoit un virage à gauche, à 90°, et la rivière s’enfourne dans un couloir, aussitôt après.
A l’extrême gauche, naît une glissière étroite en pente forte, (en rouge),  dotée d’une trappe verticale en contrebas…genre « guillotine » !

DANGER MORTEL ! (PK 12)
Ce n’est pas la glissière qui pose vraiment problème, sauf si le débit est très fort, mais la trappe, trop basse pour laisser le passage !
Outre le grave traumatisme squelettique, voire le coincement, le risque de noyade est très grand. 
En temps normal, cette glissière n’est pas fonctionnelle.

L’eau passe donc sur une large plateforme articulée, (surlignage jaune) et débouche en formant une cascade dite « de Gisors ». Idéalement, se plaquer contre les murs de rive droite et accéder sur cette plate-forme, sauf si le débit est très gros, et il faut alors passer sur elle, mais ce n’est pas sautable sans dégâts.
Le bateau peut être transbordé et les équipiers descendre contre le mur de gauche grâce à un vérin et des « marches » dans le bâti, pour rembarquer.
Ce passage n’est pas commode…et implique un contrôle visuel préalable et une analyse de la situation car il ne faut pas se laisser entraîner par le courant sur la plate-forme mobile…chute dangereuse !
Qui plus est, la bordure aval de la plate forme comporte quatre renforts d’armature en grosse cornière qui font chacun une grande saillie, une coque de bateau s’y éventrerait facilement, un être humain aussi…Donc, ne pas s’aventurer là-dessus sans visibilité.

S’il y a trop d’eau  pour être sûr de garder le contrôle de A à Z, mieux vaut s’abstenir de passer là.
Nous n’avons pas étudié la possibilité de sortir le bateau au 11ème pont ou avant, pour ré-embarquer plus en aval…(???)
Mais les berges bâties sont très hautes…pas facile !
Au pire, mais un « pire » raisonnable, prévoir de traverser le centre-ville en roulage, ce qui ne dure que 400 à 500 mètres à compter du lavoir (où débarquer reste faisable). Cela suppose d’être muni d’un petit chariot. Un portage serait pénible…
Mais portage ou roulage seraient folkloriques !

 

Passage Beauséré

A l’approche du lieu-dit Beausséré, (PK 17) on rencontre une première voie d’eau en rive gauche, interdite, puis une seconde juste avant un barrage métallique, elle aussi en rive gauche et interdite.
Les vannes sont infranchissables soit pour cause d’encombrement structurel, soit pour étroitesse extrême.

 

 

Le contournement se fait alors facilement par la rive droite, avec un très court portage mais les bords de berge sont vaseux du fait d’une sédimentation intense, et quelques orties se sont développées dans le talus.

Passage Dangu

Tout près de Dangu, une passerelle précède un barrage assez haut et dont le profil n’autorise pas un saut. (PK 19,5)
Il est précédé de deux entrées navigables mais interdites.
Tout cela est entouré de propriétés privées et de grands bâtiments anciens en cours de restauration.
Un débarquement / rembarquement est cependant toléré moyennant un passage discret de la rive gauche amont, peu avant la passerelle de bois à la rive gauche aval, peu après la chute du barrage.

 

La fin de ce parcours est désormais à portée de pagaies, elle est marquée par deux ponts très proches, le premier supporte une voie verte (recyclage d’une voie ferrée secondaire) le second permet le passage de la D6 menant à Dangu par le Sud-Est.  (PK 21)
C’est légèrement en amont de son assise de culée de rive droite que se font les embarquements des professionnels loueurs de canoës, avec navettes organisées payantes…c’est par là que nous débarquerons !
Outre les aspects de la seule navigation, il y a beaucoup de caractéristiques positives (à nos yeux) propres à ce tronçon :

  • la limpidité de l’eau, pas aussi cristalline que celle d’un torrent de haute montagne, mais une eau vraiment très claire
  • la présence très fréquente d’herbiers largement développés, sur des fonds sableux blonds vraiment esthétiques.
  • la nature variée des berges, rarement très hautes, et portant une végétation diversifiée
  • de nombreux arbres superbes, imposants, créant de magnifiques et romantiques paysages
  • de très belles habitations, modernes ou anciennes restaurées, disséminées tout au long.
  • beaucoup d’oiseaux, mammifères, poissons
  • Amabilité générale de toutes personnes rencontrées, en tous lieux.
  • doublure du parcours par une voie verte et/ou petites routes, offrant possibilité de parcours en vélo, ou en auto-stop pour éviter les navettes.
  • Vieille ville de Gisors charmante, commerçante, très fleurie.
  • traversée nautique remarquable, nonobstant le passage de la « chute de Gisors », pas garanti selon le flot observé.
  • Peu d’obstacles majeurs infranchissables, et qui sont par ailleurs facilement contournables.
  • les « maigres » ou « grilles » ou « radiers » s’ils imposent çà et là de sortir du bateau, permettent tous de le passer en flottaison, sans avoir à le porter donc ainsi que son chargement matériel.
  • Les « rapides » et « vagues », sauf en épisode de crue bien sûr, restent modérés et facilement lisibles, appréhendables, franchissables sans dommages à redouter suffisamment fréquents pour agrémenter le parcours

Attention cependant aux pêcheurs…éviter les « coups » du matin et du soir, et les week-ends propices à la pêche catégorie 1…et si rencontrés, éviter au maximum de gêner, ne pas entrer en conflit.

Après ce premier tronçon, il faudra s’attacher aux quelque 20 kilomètres plus en amont encore, au départ de Gournay-en-Bray, qui seront probablement un peu plus épiques !
Ce type de reconnaissance apprend bien comment franchir les obstacles naturels, en mettant en œuvre plusieurs procédés :

  • Franchissement par en-dessous en se baissant, voire s’escamotant, ou non
  • Franchissement du bateau par en-dessous, et des gens par au-dessus
  • Franchissement par au-dessus d’obstacles isolés flottants ou d’ embâcles flottants, méthode « brise-glace »
  • Franchissement par au-dessus, les gens dans l’eau, méthode « de la bascule »
  • Franchissement par au-dessus, les gens sur l’obstacle
  • Franchissement « entre-deux », mixant les cas précédents
  • Franchissement traversant, aérien, impliquant de ménager le passage, à la main, à la scie, à la hache, au sécateur…
  • Contournement court par une rive avec portage simple
  • Contournement long par une rive avec roulage ou portage si roulage impossible

S’ils ralentissent sérieusement la progression, il apportent une diversité de situations, impliquent réflexion et coordination des équipages, amènent le corps à sortir de postures statiques ankylosantes…
Si trop d’obstacles naturels finit par lasser et trop ralentir, car finir à la nuit n’est pas exclu du tout, ils sont un peu le sel de la sauce, et par conséquent pas si indésirables que cela, sauf dans les rivières à fort courant !

MAIS, surtout une bonne résolution plus qu’un simple conseil, ne JAMAIS s’engager dans un franchissement particulier qui n’ait pas été reconnu. (Conditions d’approche, largeur et hauteur du passage, encombrements, écueils, piquets, pieux, épaves diverses, bassin de réception, rappel, vagues…)
Sur propriété privée « civilisée », gare aux chiens ou autres animaux susceptibles de devenir agressifs (oies, dindons, taureaux…) et en cas d’échange avec riverains, ne jamais aller vers le conflit. Les rives leur appartiennent, ils sont dans leur droit…

A part ces rappels utiles, ce fut donc une jolie sortie, temps total 13 heures, sont 6 en navigation active, très enrichissante.
Gigi, équipier de « reconnaissance » nous en a fait un petit récit (article suivant, N° 693)…on l’en remercie !

 

 

 

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