Le Quatuor de Rogna 554

Le Quatuor de Rogna 554

24 juin 2022 Canyon 0

  Le Quatuor de Rogna       554

Ne disposant que de trois jours dont deux vraiment opérationnels sur place, et décidés à marier canyonisme et via-ferratisme autant que possible, nous avons opté pour un seul canyon, mais long et varié, et peu fréquenté, et c’est celui du Ruisseau des Gorges de Rogna / Vaux-lès-Saint-Claude qui nous semblera répondre au mieux à nos critères de choix.
Ce canyon offre en effet une bonne vingtaine de crans de descente, cascades et petits toboggans confondus, avec une certaine diversité esthétique et technique, un environnement magnifique et sauvage, un engagement faible sur 80% de son développement, et une praticabilité presque permanente.

Il présente aussi des inconvénients, notamment un débit aquatique souvent faible, une eau souvent trouble ou vite troublée du fait de limons argileux en suspension et remis en suspension à la moindre agitation, à peine décanté, et qui enduit tous les rochers et cailloux, créant un terrain potentiellement glissant, partout et tout le temps.
Nombre des amarrages sont installés de telle façon qu’il y a souvent des frottements, la plupart très tangentiels, pour de courtes progressions, (donc tolérables en progressant avec circonspection, malgré tout) mais certains beaucoup plus érosifs, ce qui amène soit à interposer un élément de protection de la corde au point critique, soit à décaler la corde de descente à chaque passage pour répartir le frottement aux fins d’en réduire les effets ponctuels répétés.
L’équipement a minima suppose 50 m de corde, rappels inclus, et la corde de secours en sus, mais on trouvera un confort et une plus grande sécurité avec 60 m (2 x 30).

Le parcours à 2 ou 3 en fluidité ne réclamerait que 4 heures (retour en sus) mais avec une équipe plus nombreuse et qui attend à chaque équipement, et prenant le temps d’admirer, il faut compter plutôt 6 heures.

Le retour au véhicule, si pas de navette automobile, peut se faire par deux voies, la plus longue se justifiant si on a besoin de passer par le village de Vaux-lès-Saint-Claude (ravitaillement en eau ou nourriture par exemple).
Retour rouge (par le village) compter 1h30.  Retour rose (le plus court) compter 45 minutes.
En bleu le parcours « canyon », le foncé en forêt, le clair dans le lit du torrent.
Voici à présent le commentaire de Coco :

 
 
 
Samedi : Levés à 6h30. Aujourd’hui grande journée de canyoning. 
Ça commence par le rangement du bivouac et là… La première épreuve de cette journée… Enfiler les combinaisons en néoprène. 
NDLR : une mention spéciale à Dupont de Nemours pour cette belle invention…car le Néoprène (Duprène)  est le premier caoutchouc synthétique Le latex de néoprène (famille d’émulsions aqueuses de chloroprène) fit en effet son apparition en 1934...
Elles nous permettront d’être au chaud, mais, dans l’instant, se couler là dedans est un vrai entraînement pour danseuse contorsionniste !! 
De plus, il fait vite chaud malgré l’heure matinale. 
8h, nous sommes fin prêts… Mais il faut marcher comme des pingouins engoncés et alourdis par le matériel de spéléologie adapté « canyon »
Heureusement que de la descente est dans le bois donc pas encore trop chaud…
 
 
Arrivés à la rivière nous constatons que le débit est plus de l’ordre du ru que du ruisseau !
Nous sommes heureux de nous coucher dans une mini-marmite très peu profonde…et plus près de la flaque d’eau, mais qui permet d’ humidifier et refroidir le néoprène surchauffé.
 
Si ce canyon est entrepris en période d’étiage, il est parfaitement possible de se passer des vestes de néoprène.
Les canyonistes très actifs ou actives, bien en forme, dynamiques, pas trop frileux, et en période « chaude » peuvent même aller à se passer de la salopette, mais elle n’est pas seulement protectrice contre le froid.
Une combinaison « spéléo » reste peut-être conseillée…
Et la descente  commence en randonnée dans ce canyon très verdoyant et presque tropical de par sa densité de végétation. 
Mousses sur les arbres et fougères de toutes sortes donnent cette impression de paysage de conte de fée où lutin, fées et farfadets vont débarquer. 
La progression est relativement simple au départ bien qu’il faille se méfier en permanence des glissades possibles, et nous arrivons devant la première vraie  » descente », après une première petite cascade de 4 mètres.
16m de verticale, cette fois, un peu impressionnante car avec un profil de surplomb qui ne permet pas de voir le bas… Surtout pour notre courageux toto qui, en plus du vertige, n’a pas le même entraînement technique. 
Il est prévu que pendant cette journée nous installions les voies de rappel à tour de rôle, car il s’agit de nous former ou perfectionner.
 
 
Une voie de rappel consiste le plus souvent à passer une corde dans un anneau de rappel fixé dans la paroi (déjà en place avec chaîne de sécurité) ou dans deux amarrages non reliés entre eux, ou encore sur un arbre ou autre amarrage naturel considéré comme « irréprochable ».
On mesure le métrage de cordes nécessaires et ensuite on fait un gros nœud. 
 
 
Ceci rend la corde de descente sûre…la corde elle-même étant considérée comme irréprochable.
Ensuite, une fois en bas, ce qui est souvent dans des marmites – Peu pleines aujourd’hui –  il suffit de tirer sur l’autre morceau de corde qui s’est déroulée en même temps que le sac qui contient les cordes a été jeté ou est descendu.
 
Et hop ! On récupère l’installation et on repose la corde sur la descente suivante. 
Comme dans ce genre d’activité la négligence peut nous coûter cher, voire notre vie, il est nécessaire de remballer correctement la corde pour qu’il n’y ait pas de nœud ou autre méli-mélo, et d’être sans arrêt en vigilance (sans pour autant créer de stress).
Gigi aura la charge d’installer les voies nécessitant plus de techniques… comme… Mettre un des sacs à mi-parcours afin de limiter les frottements de la corde sur les parois « agressives », ce qui pourrait l’endommager. 
Car Gigi a plus d’expérience et d’expériences…que d’autres !
Ou faire une descente avec un système de rappel utilisé en auto-moulinette afin d’installer plus bas en zone exposée.
Ou encore la mise en place d’une nouvelle corde d’amarrage à maillon permanent sur un arbre, que nous offrons à la communauté. 
Mais il apparaîtra vite qu’il n’est pas si facile que cela de faire en sorte que la corde de descente soit positionnée au ras de l’eau, souvent trop longue, ce qui, en l’occurrence ne posait aucun problème, mais doit être « travaillé », car dans les eaux profondes, les vasques agitées, et les arrivées sous cascade, l’excès de corde peut poser problème si le dégagement est entravé.
 
Je suis (Coco), contente de ces mises en place qui sont aussi formatrices et offrent une bonne révision des acquis de pratiques depuis que nous avons commencé ces activités de pleine nature dont la spéléologie. 
 
Toto progresse bien aussi même si chaque passage lui demande de surmonter ses appréhensions.
 
Arrivés vers 12h30, nous avons fait une bonne moitié du parcours.
La pause sandwich nous fait du bien mais la chaleur dans les combinaisons nous remet vite en mouvement vers l’eau.
Bientôt nous nous retrouvons face à un éboulement de roches et d’arbres. Kiki nous informe que cela est arrivé il y a environ 3 semaines, pour être passé par là il y a une quinzaine de jours. 
 
À voir le niveau d’eau du jour, nous avons du mal à imaginer cette rivière avec un débit plus grand…mais son lit en témoigne !
Durant une bonne partie de son cours, le torrent évolue dans une gorge où le paysage est très changeant, soit entre falaises serrées, soit dans des élargissements quasi horizontaux, les cascades tour à tour verticales ou déclives, et enrichies d’écrins de verdure très dépaysants. Depuis un « nettoyage » majeur de 2007, effectué par des pratiquants locaux…30 personnes et 250 heures de travail…, ce canyon se ré-encombre année après année, bien qu’actuellement les obstacles d’arbres chus ou les embâcles soient davantage un agrément distrayant qu’une gêne au canyonisme et animent un peu les tronçons marchés.
 
Pour parler technique, nous avons avec nous environ 60 mètres de corde dans le sac. 
Une corde de 35 mètres pour la descente et le rappel, plus 25 mètres de rallonge  et une troisième de sécurité, le tout  pour la dernière descente qui était la plus longue mais sans verticalité durable.
 
Quelques marmites sont suffisamment profondes pour jouer un peu à nous laisser tomber dedans et faire des petites nages. 
Quelques toboggans nous amusent aussi même si les arrivées nous vaudront parfois bien des bleus. 
Sur la fin, toto fatigué décide de contourner la descente de certaines cascades et de nous attendre bien plus bas. 
L’inconvénient est que la combinaison de néoprène, séchée et chauffée,  lui a « brûlé » l’arrière des genoux lors des marches .
 
Et voilà qu’après 7h de descente nous sommes au bout du périple… Enfin, pas tout à fait… Il va falloir remonter au camp de base !
Nous nous débarrassons de tout cet encombrant matériel… Quelle joie de se sentir plus légers. 
L’idée de départ était de cacher le tout et de remonter dans le bois en tee-shirt et slip et en étant pieds nus ou en chaussettes de néoprène dans les bottes. 
Devant cette alternative, Toto et moi nous portons volontaires pour garder le matériel et en profiter pour le faire sécher au soleil. 
Kiki ayant conscience qu’il irait plus vite sans nous, part donc avec Gigi qui aurait bien fait comme nous, mais, malheureusement pour lui,  étant le chauffeur, il devra suivre notre « baroudeur »…car, en plus, il s’agit de tester un chemin de retour encore jamais parcouru par SJV. 
Gigi est bon marcheur et de bon niveau ce qui est un avantage dans ces circonstances. 
 
Ils leur faudra 1h30 pour revenir, dont 45 minutes de marche pour 3200 m et 370 m à déniveler… et vu la chaleur cela aura permis aux combinaisons de sécher à 90 %. 
Avec Toto nous aurons échangé sur la philosophie de la nature humaine et n’avons pas vu le temps passer. 
 
L’envie forte d’une pause « boisson fraîche », comme celle de la veille, titille tout le monde. 
Nous trouvons un bel endroit original qui nous ravit. 
Boissons fraîches et feuilleté aux framboises….dans une salle « climatisée ».
 
Reprise de la route pour rejoindre Morez, destination de notre activité du lendemain. 
Le bivouac est installé dans une charmante prairie au cœur d’une belle hêtraie-pessière.
Nous sommes fatigués mais il est encore un peu tôt pour se coucher !
Aussi installons-nous le campement et faisons un petit temps de repos avant le dîner. 
Pour créer l’ambiance nous finissons avec de la musique, ce qui peut être agréable dans cet endroit au milieu de rien d’autre que la nature.

C’est alors que Gigi nous apporte quelques réflexions…
 
Le canyon s’est déroulé en 7h00 ( 8h30 – 15h30 ), sans compter le temps de retour à la voiture puis avec la voiture…soit 1h30 à ajouter.Encore un super-séjour avec ce canyon intimiste car un peu difficile d’approche et de retour : avec plus d’eau dans ce torrent, cela aurait la « perfectude » de la perfection suprême !Mais bon, ne soyons pas super trop exigeants car pour des sorties comme celles-là, je nous trouve très très privilégiés.Merci à SJV pour la formation continue ainsi dispensée, la disponibilité de telle ou tel, et de de nous faire partager certains endroits que nous n’irions même pas imaginer.
 
 
 
 
 
Merci également aux autres protagonistes pour ce séjour encore exceptionnel, car la réussite de telles entreprises est celle de chacune et chacun.
 
Au final, un canyon très recommandable, plus intéressant et vivant quand il coule bien, plutôt formateur, à entreprendre en petit groupe, et à vivre sans trop se presser. Une valeur sûre à mettre dans les plannings !
 

 

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