Le syndrome du harnais en via ferrata 504

Le syndrome du harnais en via ferrata 504

16 février 2022 Via ferrata 0

Le syndrome du harnais en via ferrata     504

On part pour une belle via ferrata, casqué, chaussé, cuissardé, doublement longé, éventuellement ganté et « poulité », et, pour les prévoyants, avec  une jolie sangle pédalière bien rangée à la hanche, la longette en prime, bien sûr…(on ne parle pas du petit sac à dos et ce qu’il est censé contenir, en principe…).
Tout va bien, les oiseaux chantent, le soleil brille, les copains et copines rient et papotent plus loin devant , et, soudainement, une guêpe nerveuse vient menacer Zigomar au beau milieu d’un pont de singes à deux brins…gesticulation, énervement, Zigomar perd pied sur le câble et tombe., son seul petit bras encore sur le câble n’ayant pas suffi à enrayer le phénomène de chute plein vide.
 Plus de peur que de mal, le voici suspendu à ses longes (car il avait bien  mis les deux) mais voilà…ce sont des plates et élastiques !
Qui plus est, l’amortisseur à coutures progressives a un peu fonctionné…Zigomar pendouille au bout de 110 cm, dans son cuissard et a bien failli culbuter car il n’a pas de torse. Les bras beaucoup trop courts pour attraper le câble de sa suspension…(et encore sa belle longe Edelrid la plus extensible  lui aurait mis le nombril à 1,2 m du câble de suspension…).
Zigomar est un beau gaillard bien nourri, mais les biceps et la préhension des mains ne lui permettent pas de remonter à la force des bras sur ses longes d’autant que son sac de 4 ou 5 kg et son matos complet n’arrangent rien…il n’est pas loin de 100 kg à tirer…
Là, pas de chance, son poids sur le câble supérieur le tend au plus bas et aucun poids sur l’inférieur fait que ce dernier est détendu et à la hauteur de ses yeux !
A ce stade, tout va encore assez bien, mais il s’agirait de remonter debout sur le câble porteur ce à quoi il ne parviendra pas…car c’est loin d’être facile, (bien peu ont essayé, pour voir…) et Zigomar va très vite fatiguer, pour finalement abandonner et appeler à la rescousse…mais les copains et copines ont continué, et ne sont plus à proximité, et,tout à leur babillage joyeux, ne s’inquiètent pas de ce qu’il n’est pas déjà là.
Sans doute admire-t-il le paysage ou fait-il des photos…

Zigomar pendouille…il ne bouge plus attendant que quelqu’un revienne, cela quelques minutes…8, 10  peut-être et voilà le schéma qui se dessine pour lui, hélas :  (selon Frédéric Bussienne)

Oui, il va s’agir du Syndrome du Harnais (SdH), ou encore du Traumatisme de Suspension (TdS) induisant l’Intolérance Orthostatique, les problèmes pouvant commencer à survenir dès les premières minutes de l’immobilisme (4 à 10 minutes en moyenne, et moins de 30 minutes la plupart du temps) pour atteindre la perte de connaissance et, peu après, une mort probable.

L’ensemble des expériences réalisées et des observations de terrain montre des manifestations cliniques identiques dans la plupart des cas :
Sensation de malaise générale
Sueurs
Nausées
Vertiges
Bouffées de chaleur
Sensations d’oppression thoracique
Augmentation de la fréquence cardiaque et apparition de troubles du rythme
Augmentation très importante de la tension artérielle
Perte de connaissance

Ce n’est donc pas une petite affaire mais bien un urgence absolue !
reprenons ici au compte de notre site un extrait du rapport de Frédéric Bussienne
Tout individu suspendu sans mouvement doit être décroché de toute urgence par ses coéquipiers. Cela suppose donc des différents pratiquants et intervenants la connaissance d’une part, de cette pathologie et de la gravité qui en découle et d’autre part, des techniques de décrochage de la victime.

PRISE EN CHARGE INITIALE
C’est la phase de sauvetage qui vise à décrocher au plus vite toute personne en situation à risque. Cette phase impose des différents pratiquants une connaissance parfaite du matériel de progression sur une corde et des techniques de secours en paroi (cordes débrayables, sécurisation des fractionnements, utilisation d’un couteau…).
Cette étape sera également l’occasion de déclencher les secours.
Deux cas de figure peuvent se présenter :


• La victime est consciente :
o Les autres membres de l’équipe doivent garder un contact permanent afin de rassurer la victime
et afin de détecter les signes prémonitoires du malaise .
o La victime doit également s’efforcer de bouger ses membres inférieurs afin de retarder
l’apparition d’un malaise.
o Une fois détachée, la victime doit être descendue au sol et doit rester debout ou tout du moins en
position assise ou accroupie.
o La prise en charge ultérieure dans ce cas va dépendre du temps de suspension sur corde et de
la présence ou non des signes de malaise.
 En cas d’un délai supérieur à 30 minutes, la victime doit être transportée dans un
hôpital doté d’un centre de dialyse .
 Si ce délai est inférieur à 30 minutes et en l’absence de signes évocateurs d’un SdH, il
ne semblerait pas utile de poursuivre une prise en charge particulière.

• La victime est inconsciente :
o La prise en charge est dans ce cas très controversée. Le positionnement de la victime est
discuté du fait des risques d’une part, liés à la perte de connaissance et, d’autre part, à ceux liés à un retour sanguin massif vers le ventricule droit à l’origine, pour certains, d’un arrêt cardio-respiratoire. Les recommandations suivantes doivent donc être prises avec circonspection.
o En cas d’arrêt cardiorespiratoire, une réanimation cardio-pulmonaire doit être entreprise sans
délai.
o En présence d’une respiration autonome, la victime doit être descendue au plus vite et placée
dans une position assise dans un endroit chaud (point chaud).
o La prise en charge préhospitalière et hospitalière sont ici indispensables.

Revenant au cas de Zigomar, qui ne sera pas encore inconscient (ouf !) le plus important sera qu’il BOUGE les jambes, notamment en les relevant l’une après l’autre, il faut donc l’y exhorter !
Puis le rejoindre, se longer court et l’aider à se relever. C’est là que la bonne sangle pédalière va pouvoir jouer son rôle si les forces cumulées d’un(e) voire deux sauveteurs ou sauveteuses ne suffisent pas (pas de chance, zigomar pèse 90  +10 kg ,  le premier sauveteur seulement 55 et pas très musclé…et de plus, en proie au stress)
Bien sûr, des longes en corde dynamique non extensibles auraient été bien moins problématiques, et avec un torse, la situation encore moins problématique !
Et, mieux encore…un bloqueur !

Mais pour aujourd’hui, Zigomar s’en est quand même bien tiré, moins de 10 minutes, pas tombé dans les pommes, pas trop « secoué »…
Il se dit que sa sangle pédalière, faute de lui permettre de remonter sur le câble aurait pu aussi lui permettre de se redresser et tenir debout sur une jambe, cramponné à ses longes, quitte à  changer de jambe de temps en temps…car ceci aurait réduit par dix le risque de présenter un SdH.
Cette sangle, il l’aurait crochetée dans le « V » de ses longes, par exemple…
Et que, si longes extensibles (bien pratiques dans certains cas) la bonne précaution pourrait être d’avoir deux pédales (en matériau léger tel que le Dyneema), une de chaque côté, car avec cela, on remonte d’abord dans le V des longes avec l’une, puis sur le câble avec l’autre.

 


Par ailleurs, une longette sur pontet de cuissard (ou MAVC) est de loin préférable à un mousqueton dans la sanglette des longes modernes, car elle en est alors indépendante…donc utilisable à divers titres.
Quoi qu’il en soit, tout(e) via ferratiste, (spéléologue, cordiste, alpiniste…) surtout s’il ou elle évolue seul(e), doit savoir quoi faire pour éviter un SdH ou protéger très vite une personne de cette menace mortelle le cas échéant.

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